La fin des temps
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La fin des temps, que je viens de terminer et qui me laisse avec un grand sentiment de nostalgie, est un roman onirique et poétique, très simple mais également extrêmement complexe.
Il commence dans un ascenseur de taille gigantesque, si lent qu'on ne sait s'il monte ou descend. Finalement arrivé à destination, le narrateur, un informaticien, est accueilli par une jeune fille grassouillette et muette qui le conduit à travers des couloirs interminables. Il devra revêtir une combinaison étanche, s'enfermer dans un placard qui le conduira vers un monde fantastique, abritant d'horribles "ténébrides" mais où se terre un savant génial pour lequel il doit coder un ensemble de chiffres et les protéger d'un concurrent menaçant.
Dans un autre monde, que l'on imagine appartenir à un passé lointain, un autre narrateur découvre la "ville de la fin des temps", ville parfaite, où ont été abolis la mort, mais aussi l'amour ou le désespoir. Ceinte d'une muraille infranchissable, elle exige de ses habitants de renoncer à leur cœur et à leur ombre pour y résider éternellement. Le lien entre les deux histoires se situe dans le crane d'une licorne, qui brille la nuit et abrite les "vieux souvenirs", oublié de tous.
Alternant les histoires sur un mode labyrinthique, Murakami montre la quête de deux personnages, incapables de maîtriser ou infléchir leur destin. Condamnés à une déchéance inévitable, le seul objet de leur quête est d'en comprendre les raisons pour finalement décider, ou non, de l'accepter. Confrontant le vraisemblable à l'invraisemblable, Murakami met en évidence dans la fin des temps ce qu'il y'a d'irrationnel dans nos rêves ou nos activités quotidiennes et comment l'essor incontrôlé de la technologie créé une solitude impossible à combattre.
Extrait :
Comme des joyaux aperçus au fond d'une onde transparente, les crânes distillaient la silencieuse lumière promise. Je pris l'un d'eux dans ma main, passai doucement le bout des doigts sur la surface. Alors, je sentis la présence de son cœur a l'intérieur. Son cœur était là. Il flottait, minuscule boule au bout de mes doigts. Ces petites particules de lumière n'avaient chacune qu'un peu de lumière et de chaleur à offrir. Mais cet atome de chaleur et de lumière, rien ne pouvait le leur ôter
- Ton cœur est ici, dis-je. Ton cœur s'est élevé et c'est lui qui scintille ici. Elle eut un petit hochement de tête, puis elle me jeta un long regard mouillé de larmes.
- Je peux lire ton cœur. Et puis je peux en remettre les morceaux ensemble. Ton cœur n'est plus perdu ni fragmenté. Il est ici et plus personne ne pourra te l'enlever.
Je posais à nouveau les lèvres sur ses yeux.
- Laisse moi seul ici un moment. Avant le matin, j'aurai fini de lire ton cœur. Après je dormirai un peu.
Elle hocha à nouveau la tête et sortit de la réserve après un dernier regard à la rangée de crânes scintillants. Quand elle eut refermé la porte, je restai pendant un temps infini, adossé au mur, à contempler les innombrables billes de lumière éparpillées sur les crânes. Cette lumière était celle des vieux rêves qu'elle avait embrassés, et en même temps, c'étaient mes vieux rêves à moi. Après un long périple à l'intérieur de cette ville encerclée de murailles, j'étais enfin parvenu à les retrouver.
Je pris un des crânes, posai les mains dessus et fermai doucement les yeux.
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